A vos marques ? Prêt, feu, go : partez !
Et c’est ainsi que vous vous lancez dans la vie. On papillonne, à droite, à gauche. Certains butinent de fleur en fleurs, d’autres foncent droit vers leurs objectifs. On naît souvent entre les mains d’une sage-femme ou d’un obstétricien, on grandit sous la surveillance du pédiatre et/ou du généraliste, on fait parfois appel à quelques spécialistes, un radiologue par-ci, un biologiste par-là. L’adolescence rencontre le dermatologue. Puis on prend de l’âge et quelques fois, du cholestérol. Direction l’endocrinologue. Certaines maladies se réveillent, parfois complexes et c’est l’interniste. Il arrive que le cœur déraille, que les reins lâchent ou que les os s’enflamment, et l’on rend alors visite au cardiologue, au néphrologue ou au rhumatologue selon le cas. En principe, le fameux parcours de soin voudrait que le spécialiste généraliste nous adresse savamment vers le spécialiste d’organe adéquat. Comme un guide dans les branches multiples et toujours plus complexes de l’arbre médical. Mais si seulement c’était si simple…
Même quand on se rend chez le boulanger, il n’y a pas que la qualité du pain qui compte. Si la saveur de l’aliment est un facteur de choix de sa boulangerie préférée, il en existe tellement d’autres qui conditionnent parfois de manière définitive ce choix. Si l’aspect du pain, l’esthétique de l’enseigne, le panel de pâtisseries proposées sont des éléments importants, il en existe un qui, selon moi, prime sur tous les autres. On pourrait parler de la politesse des vendeurs, de leur amabilité, de leur sourire ou de leur bonne humeur… Il ne s’agit là que de quelques unes des multiples facettes de la Confiance. Avoir confiance, c’est assez objectif finalement. Quand on a confiance, on le sait, au plus profond de soi. Cela ne veut pas dire que c’est définitivement acquis. Cela ne veut pas dire qu’on aura toujours confiance. Mais lorsque l’on fait confiance, on le sait. Et il ne me paraît pas abscons de dire qu’entre un boulanger louche et celui en lequel on a confiance, le second sera toujours préféré au premier. Sauf si on aime le pain aux raisins saveur mouche grillée.
Sans transition, il va de soi que le choix d’un médecin repose, à mon avis, sur la confiance qui s’est établie entre le patient et le professionnel de santé. On pose souvent la question de savoir que choisir entre un médecin très compétent mais qui n’inspire pas confiance et un médecin aux compétences plus modestes mais qui inspire confiance. Est-ce que le fait d’avoir créé une confiance réciproque entre ces deux acteurs du soin et de ne pas la trahir lors que le professionnel arrive à la limite de ses compétences n’est pas, déjà, la preuve d’une compétence de qualité tout à fait satisfaisante ? Savoir dire « je ne suis pas capable de » ne constitue-t-il pas déjà une formidable compétence qu’est de connaître ses limites ? Questions à creuser, indubitablement.
Mon médecin généraliste est un homme formidable. Il m’a vu grandir, et pourtant, même après toutes ces années, je le vois encore comme ce monsieur omniscient, qui sait me faire mettre les mots sur mes maux pour ensuite les apaiser. Plus le temps passe, et plus je sens poindre l’humain derrière la blouse (qu’il ne porte pas, par ailleurs). Il est sûrement l’élément déclencheur de mon envie de faire médecine, et l’un de mes plus solides modèles. Le premier à m’avoir appelé « futur confrère » suite à ma réussite du concours de première année. Le premier à m’avoir indirectement parlé de groupes type Balint pour « quand je serais plus grand ». Mais dès la première consultation, le premier médecin à m’avoir d’emblée inspiré confiance pour ne jamais la perdre.
Pourquoi tout ce blabla ? Parce qu’on n’a pas toujours autant de chance. J’ai omis de mentionner un spécialiste crucial dans la vie de la moitié de l’humanité dans mon premier paragraphe. Plus difficile encore que de trouver le psy qui vous convient, la quête du gynécologue optimal revient à chercher le saint Graal ! Oui, je suis un garçon, me direz-vous. C’est vrai, mais un garçon amoureux d’une jeune femme. Et nous avons l’énorme défaut d’être étudiants en médecine, et là, les choses se compliquent sérieusement. Car trouver un bon gynécologue quand, en plus, on a lu Martin Winckler, le blog du Dr Borée, celui de Sophie Sage-Femme, et tant d’autres en plus de sa liste twitter, je vous assure que ce n’est pas une chose facile. Entre les gynécologues adeptes de la consultation en 5 minutes avec déshabillage intégral avant de dire bonjour, les gynécologues pour qui les antécédents jusqu’à la date des premières règles sont aussi importants que le nombre de points rouges sur le dos d’une coccinelle asiatique, et les foutus gynécologues qui déclarent haut et fort qu’on ne pose pas de DIU à une femme nullipare alors que même la biologiste qui fait une prise de sang vous dit que c’est possible, franchement, comment fait-on ?! Suis-je totalement biaisé par mes lectures ? Le rôle d’un gynécologue n’est-il pas de se tenir UN MINIMUM au courant des avancées dans le domaine de la contraception ?! Être un peu de l’ancienne génération n’est, pour moi, en rien une excuse ! A quoi sert la formation continue dans ce cas ?!
Et vraiment, quel horrible sentiment d’impuissance quand votre compagne vous parle de sa consultation. Quand vous entendez des choses absolument stupides avec des arguments irrecevables. Quand vous avez juste envie d’avoir été là pour lui balancer les références du livre « Le Chœur des Femmes » de Martin Winckler avec un gentil mot du genre « Pour votre culture qui en a bien besoin ». Comment peut-on négliger son métier de la sorte ? Comment peut-on balayer en moins de deux toute possibilité de confiance ? Et comment il faut chercher le « bon gynéco » sachant combien il peut être désagréable d’aller voir un tel spécialiste (j’hésite à aborder la consultation « à l’anglaise » mais ça me démange) et qu’il faille à chaque fois recommencer… Quand le parcours de soin relève davantage du parcours du combattant en somme.
Martin Winckler, je vous adore, vous et votre vision du soin. Mais je vais finir par croire que les bons gynécologues n’existent que dans vos livres…